Special Issue: Terminologia e traduzione: interlinguistica, intralinguistica e intersemiotica

L’analyse conceptuelle des éléments tax, impôt et taxe à l’épreuve de la formalisation distributionnaliste des exemples de traduction de tax comme élément unitaire, noyau ou modifieur

By Danio Maldussi & Éric A. Poirier (Università di Bergamo, Italia & Université du Québec à Trois-Rivières, Canada)

Abstract

English:

We first describe the method of extraction of key economic and financial concepts from the IATE database, which is at the basis of the conceptual and terminological analysis of the key concepts of tax in English, French and Italian, and the distributional and discourse analysis of examples of translations of tax into French in three lexical-syntactic constructions, namely tax as a unitary element, as head element or as a modifier element. In the first part, our analysis of the definitions in fiscal law of tax, taxe, impôt and the uses of imposta and tassa in Italian confirms the conceptual vagueness induced by the legislator and the incompatibility of the defining features of these concepts in different language-cultures, which ultimately explains the quasi-synonymy of taxe and impôt in French. In the second part, the analysis of 103 examples of the translation of tax into French in the three basic lexical-semantic constructions of tax confirms the general quasi-synonymy of the two terms in French with some specializations in terms of their uses according to the syntactic constructions of the element tax. Our two-part analysis, conceptual and translational, shows that these two analyses feed each other. Despite the conceptual vagueness that gives rise to sometimes inconsistent uses of tax and impôt, the translation examples show the existence of pragmatic and discursive criteria for differentiating the uses of tax and impôt in specialized language that translators exploit in discourse to reduce conceptual vagueness.

French:

Nous décrivons tout d’abord la méthode d’extraction des concepts clés de l’économie et de la finance dans la base IATE qui est à l’origine de l’analyse conceptuelle et terminologique en droit fiscal des notions de tax en anglais, en français et en italien puis de l’analyse distributionnelle et discursive d’exemples de traductions de tax en français dans trois constructions lexico-syntaxiques, à savoir tax comme élément unitaire, comme élément noyau ou comme élément modifieur. En première partie, notre analyse des définitions en droit fiscal de tax, de taxe, d’impôt et des utilisations d’imposta et de tassa en italien met en évidence le flou conceptuel induit par le législateur et l’incompatibilité des traits définitoires de ces concepts dans différentes langues-cultures, ce qui explique en fin de compte la quasi-synonymie de taxe et d’impôt pour ce qui est du français. En deuxième partie, l’analyse de 103 exemples de traduction de tax en français dans les trois constructions lexico-sémantiques fondamentales de tax confirment la quasi-synonymie généralisée des deux termes en français avec quelques spécialisations de leurs usages en fonction des constructions syntaxiques de l’élément tax. Notre travail d’analyse en deux parties, conceptuelle puis traductionnelle, montre que ces deux analyses se nourrissent l’une l’autre. Malgré le flou conceptuel qui donne lieu à des emplois parfois incohérents de taxe et impôt, les exemples de traduction montrent l’existence de critères pragmatiques et discursifs de différenciation des emplois de tax et d’impôt en langue spécialisée que les traducteurs exploitent en discours pour réduire l’imprécision conceptuelle.

Keywords: impôt, taxe, analyse conceptuelle, analyse distributionnelle, analyse discursive, tax, conceptual analysis, distributional analysis, Discourse Analysis

©inTRAlinea & Danio Maldussi & Éric A. Poirier (2023).
"L’analyse conceptuelle des éléments tax, impôt et taxe à l’épreuve de la formalisation distributionnaliste des exemples de traduction de tax comme élément unitaire, noyau ou modifieur"
inTRAlinea Special Issue: Terminologia e traduzione: interlinguistica, intralinguistica e intersemiotica
Edited by: Danio Maldussi & Eva Wiesmann
This article can be freely reproduced under Creative Commons License.
Stable URL: https://www.intralinea.org/specials/article/2637

1. Introduction

Nous souhaitons participer au projet de numéro spécial d’inTRAlinea sur le thème des réflexions sur la terminologie sous l’angle de la traduction interlinguistique et intralinguistique de type multilingue. Nous proposons une analyse conceptuelle de termes clés des domaines de la fiscalité et du droit tributaire qui sont étroitement corrélés à celui de la traduction économique et financière. Notre démarche contrastive multilingue vise la conceptualisation mixte, onomasiologique et sémasiologique, des contenus qui s'appuie sur une sélection des concepts clés extraits automatiquement des données provenant de la banque de données IATE. L'analyse conceptuelle que nous décrivons et menons sur les termes choisis dans les domaines susmentionnés est susceptible de s’appliquer à l’acquisition de connaissances spécialisées dans d’autres champs de spécialisation en traduction.

En première partie, nous décrivons une méthode d’extraction des concepts clés qui a permis de constater le rôle prépondérant du concept tax en anglais dans les fiches terminologiques de la banque IATE et de nous intéresser à ses difficultés ou particularités de traduction en français.

En deuxième partie, nous présentons une vue d’ensemble du domaine de la fiscalité qui servira de prélude à une comparaison notionnelle interlinguistique des concepts tax, impôt, taxe, imposta et tassa qui mettra en évidence les différences conceptuelles et les similitudes discursives de ces notions. Nous décrivons plus particulièrement ici les critères utiles de différenciation en langue et de rapprochement en discours. Comme nous aurons l’occasion de l’analyser, les aspects culturels liés aux différents usages dans les systèmes fiscaux respectifs, ainsi que les définitions cohérentes au niveau jurisprudentiel qui se heurtent à un usage contradictoire, rendent plus complexe le cadre de l’analyse, auxquels s’ajoute le flou conceptuel induit par le législateur qui entretient parfois la confusion en appelant taxes de véritables impôts. Paradoxalement, c’est bien le manque de cohérence dans la conceptualisation définitoire, persistant en principe, entre taxe et impôt qui finit par favoriser la ressemblance synonymique entre les deux termes.

En troisième partie, nous nous attaquons aux techniques et particularités de traduction du concept tax selon les constructions terminologiques et phraséologiques dans lesquelles il apparaît, en suivant l’ordre d’importance de l’élément conceptuel dans les syntagmes : en tant qu’emploi unitaire, en tant que noyau syntaxique puis dans ses emplois en apposition. Comme dans Poirier (2015), nous préférons caractériser tax dans ces différentes constructions comme un élément plutôt que comme une catégorie grammaticale particulière puisqu’il peut être, selon le cas, nom, adjectif ou verbe, et aussi parce que sa relation avec les autres éléments des syntagmes dans lesquels il figure est plus ou moins compositionnelle ou disjointe selon que l’ensemble constitue une expression librement formée, un terme complexe, un terme composé ou une unité phraséologique. Notre objectif est celui de vérifier comment la formalisation conceptuelle de la première partie de notre article, malgré tous ses aspects contradictoires, se reflète dans les traductions extraites du concordancier bilingue TradooIT. Nous cherchons à établir de quelles façons cette analyse préliminaire peut jeter de la lumière sur l’utilisation de taxe et impôt dans la traduction de différents emplois de tax, faisant émerger des critères de spécialisation et de différenciation de ces notions.

2. Aspects méthodologiques : extraction des concepts clés des fiches de la banque IATE, construction de deux corpus unilingues et analyse par Sketch Engine

Pour les besoins de formalisation conceptuelle dans les champs de l’économie et de la finance, nous avons tout d’abord constitué un corpus de concepts (et de termes correspondants) qui jouent un rôle clé dans les champs de spécialisation. L’approche traditionnelle en terminologie consiste à utiliser un ensemble de textes représentatifs du domaine puis à dépouiller ces textes à la recherche de termes simples et complexes qui caractérisent, par leur fréquence, les textes du champ de spécialisation. Cette méthode de dépouillement traditionnelle, qui convient à la confection d’ouvrages terminologiques, nous a semblé moins pertinente pour notre objectif de recherche car les banques de terminologie générale et spécialisée, dans un cours traditionnel de traduction spécialisée, servent de support de ressources primaires et secondaires (Poirier, 2013) destinées essentiellement à être consultées dans l’exercice de la traduction. Les banques de terminologie comme ressources primaires donnent accès à des propositions de traduction, à des définitions conceptuelles, à des contextes d’utilisation représentatifs, mais aussi à des discours linguistiques et traductologiques sur l’usage de ces termes et concepts. Ces discours, quoique bien intégrés dans les répertoires terminologiques sous la forme de notes d’usage, d’observations et de remarques, que Raus définit comme des « marques d’archives » (2015 : 292), constituent ni plus ni moins que des ressources secondaires très importantes pour l’exercice de la traduction puisqu’elles fournissent des avis, des conseils et des recommandations qui invitent les traducteurs à faire preuve d’esprit critique sur les solutions de traduction qui sont proposées dans ces répertoires.

Notre démarche conceptuelle a porté sur l’exploitation des contenus fournis et compilés dans des banques terminologiques que nous concevons ainsi comme des ressources primaires et secondaires d’information à partir desquelles doit s’appuyer l’acquisition d’un discours scientifique ou critique sur les traductions conventionnelles (répertoriées dans les ressources dictionnairiques) et non conventionnelles (qui appartiennent au discours et qui recourent à d’autres solutions de traduction que les précédentes[1]) des termes et des concepts clés d’un champ de spécialisation de la traduction. De notre avis, l’objectif principal du discours scientifique sur la traduction consiste à fournir des explications et des généralisations que l’on peut tirer sur les solutions de traduction conventionnelles et non conventionnelles (discursives). C’est en tous cas l’objectif que nous nous sommes fixés dans le présent article.

La présélection du corpus des termes clés de l’économie et de la finance a été faite à partir de l’extraction de toutes les fiches terminologiques portant sur au moins un des trois grands domaines conceptuels de la banque IATE associés à l’économie et à la finance, à savoir les domaines économie (economics), qui, à la date d’extraction, compte 69 786 termes, finance (finance), qui compte 125 394 termes et commerce (trade), qui compte 43 854 termes. Comme un même terme peut appartenir à plus d’un domaine, il peut se retrouver dans plus d’un de ces fichiers. Dans les options de téléchargement de la banque IATE, outre les trois domaines, nous avons aussi choisi l’option Tous les termes, ce qui comprend les abréviations, les formules, les phrases, les formes courtes des termes. Enfin, toutes les options ont été cochées concernant la fiabilité des fiches ainsi que l’évaluation des termes (la sélection à partir de ce critère est faite à une étape subséquente de la constitution du corpus de termes clés). L’exportation des fiches de chaque sous-domaine (économie, finance et commerce) de la banque terminologique IATE a été faite dans trois fichiers de format csv le 5 janvier 2021.

L’extrait ci-dessous présente les cinq premières lignes du fichier de données du domaine de l’économie.

E_ID|E_DOMAINS|L_CODE|T_TERM|T_TYPE|T_RELIABILITY|T_EVALUATION

1314406|statistics;FINANCE|fr|déclaration statistique et fiscale|Term|Minimum reliability|

1314406|statistics;FINANCE|fr|DSF|Abbrev|Minimum reliability|

1314406|statistics;FINANCE|en|Tax and Statistical Return|Term|Minimum reliability|

1314406|statistics;FINANCE|en|TSR|Abbrev|Minimum reliability|

La première ligne contient l’en-tête ou l’intitulé de chaque colonne des données exportées de la banque terminologique. Chaque ligne subséquente du fichier correspond à une entrée d’une fiche de la banque IATE qui correspond à un terme, à un synonyme ou à une variante dans une seule langue. Dans l’exemple précédent, les lignes 2 à 5 comptent quatre entrées tirées de la même fiche terminologique occupant chacune une ligne, soit une ligne pour le terme au long en anglais, une ligne pour l’abréviation de ce terme en anglais puis une ligne pour le terme au long en français, et une quatrième ligne pour l’abréviation du terme en français.

Dans la première colonne des lignes 2 à 5, l’utilisation du même numéro d’identification renvoie au numéro associé à un concept générique défini dans le thésaurus EuroVoc, le répertoire officiel du vocabulaire normalisé de l’Union européenne. Ce dernier, comme on peut le lire sur le site d’EUR-Lex, est le thésaurus multilingue et multidisciplinaire de l'Union européenne. Il contient des mots-clés, répartis dans 21 domaines et 127 sous-domaines, qui servent à décrire le contenu des documents disponibles dans EUR-Lex ». EuroVoc permet la consultation en ligne de la « législation de l'UE et les documents liés (législation, documents préparatoires, accords internationaux, communications relatives à la jurisprudence, questions parlementaires, etc.) par domaine et sous-domaine »[2]. Cet ouvrage important est étroitement lié à la banque de données terminologiques IATE car il contient la liste des concepts et des termes normalisés qui servent à décrire toutes les activités de l’Union européenne.

En l’occurrence, le numéro d’identification de la fiche précédente renvoie au concept générique 1314, dans lequel a été classé le concept spécifique 1314406 dans le vocabulaire EuroVoc. Le concept générique 1314 correspond à la dénomination impôt foncier en français, property tax en anglais, imposta fondiaria en italien et contribución territorial en espagnol (pour ne nommer que sa dénomination dans quatre des 27 langues de l’Union européenne). L’intérêt d’une approche notionnelle qui permet de rapprocher des dénominations différentes d’une langue à l’autre mais qui sont employées pour désigner le même concept est évident pour la pratique terminologique. Toutes les fiches terminologiques de la banque IATE, peu importe leur langue, sont associées à un concept numéroté défini dans le thésaurus EuroVoc. Cette démarche offre l’avantage de dissocier le découpage terminologique des notions ou des concepts de celui qui est offert par la langue source, dans le cas de la traduction, ou du terme vedette dans le cas de la terminologie. Les concepts de l’EuroVoc fondent ainsi une conceptualisation objective à base d’ontologies qui est indépendante des biais conceptuels culturels qui font souvent partie intégrante des dénominations en usage dans les différentes langues, comme nous avons vu pour les dénominations de l’impôt foncier dans les quatre langues et, comme nous l’étudierons dans les prochaines sections, pour les dénominations tax, taxe, impôt, tassa et imposta. Même si nous avons pu retracer le concept générique 1314 dans le thésaurus, nous n’avons pu repérer le concept précis auquel correspond le concept spécifique 1314406 dans le thésaurus EuroVoc. Il devient ainsi difficile de déterminer précisément à quel concept renvoie le concept 1314406 sans se référer aux termes auxquels il est associé dans les fiches de la banque IATE, à savoir les dénominations Déclaration statistique et fiscale en français et Tax and Statistical Return en anglais, ainsi que leur abréviation respective. Cet exemple illustre les limites de précision que permet d’offrir un classement ontologique comme celui d’EuroVoc appliqué à la définition des termes décrits dans une banque de données terminologiques comme la banque IATE.

Dans la deuxième colonne figurent les premiers éléments d’information des domaines mentionnés dans la fiche terminologique de la banque IATE. Ceux-ci peuvent correspondre au domaine générique ou spécifique, mais ils peuvent aussi correspondre à un autre concept (distinct du numéro d’identification de la fiche) du thésaurus EuroVoc qui lui est associé. Dans les exemples de l’extrait ci-dessous, les termes appartiennent au domaine de la finance (en majuscules) mais sont associés aussi au concept statistiques, lequel appartient au domaine générique de l’économie (16) et au domaine spécifique (1631) de l’analyse économique, ce qui explique l’exportation du terme dans les fiches du domaine de l’économie, même si la mention du domaine de l’économie ne figure pas à proprement parler dans le jeu de données, qui ne mentionne que le domaine générique Finance et le concept associé statistiques.

Un algorithme que nous avons conçu en langage Python a permis d’extraire de ces données structurées les termes anglais et français qui se trouvent dans la quatrième colonne en fonction de leur fiabilité. Seuls les mots-formes des termes jugés fiables (Reliable) et très fiables (Very Reliable) ont été retenus. Les mots-formes extraits des fiches terminologiques ont ensuite été copiés dans un fichier de format csv à une colonne. Un fichier a été créé pour les termes en anglais et un autre a été créé pour les termes en français. Chaque liste de termes a servi à former un corpus unilingue de concepts clés dépourvus de contextes d’utilisation mais qui contient l’ensemble des termes fiables et très fiables du domaine de la finance. Ces deux corpus ont ensuite été traités dans un outil de gestion de corpus comme Sketch Engine en vue de procéder à des analyses de fréquence.

Cette première sélection des concepts clés des domaines de l’économie, de la finance et du commerce est intéressante puisqu’elle permet de cibler les concepts clés qui sont les plus productifs dans la création de fiches terminologiques dans ces domaines de spécialisation. Les données sur la fréquence ne sont pas des données textuelles puisqu’elles correspondent à la fréquence d’utilisation des mots-formes dans les fiches terminologiques de la banque IATE pour les trois domaines que nous avons sélectionnés. En outre, ces données sont susceptibles de contenir des bruits du fait que la fréquence des termes peut aussi s’expliquer par le nombre de domaines parmi les trois que nous avons choisis auxquels un même terme peut appartenir. Pour cette raison, cette méthode d’extraction peut entraîner une légère surreprésentation des termes qui sont employés dans les trois domaines de l’économie, de la finance et du commerce.

Malgré ces quelques réserves, nous avons pu de cette façon sélectionner parmi tous les concepts de la finance les concepts clés qui s’avèrent très productifs dans la création de fiches terminologiques. Ces données montrent le rôle central du concept de tax en anglais qui arrive en première place dans cette liste et du terme impôt en français qui arrive au troisième rang des concepts clés les plus fréquents. Le terme taxe occupe la 37ème position. La différence de rang peut s’expliquer par le doublet conceptuel de tax et d’impôt en français par rapport à tax en anglais. Pour conclure, dans la section 5 nous proposons des remarques concernant les traductions qui se retrouvent en français dans différentes constructions syntaxiques de tax qui sont susceptibles de favoriser ou de mettre à contribution une analyse conceptuelle distincte, notamment : les emplois unitaires de tax, les emplois de tax comme élément noyau ainsi que les emplois de tax comme élément modifieur. Notre étude se fonde sur l’analyse des constructions et des traductions d’un corpus de 103 occurrences du mot-forme tax en anglais et de ses traductions fournies le 9 août 2022 dans l’interface de l’outil en ligne TradooIT (tradooit.com). Ces trois constructions comptent respectivement 12 (11,7 %), 22 (21,4 %) et 56 (54,4 %) occurrences sur les 90 occurrences originales de notre corpus (auxquelles on doit ajouter 13 occurrences (12,6 %) qui ont été fournies deux fois dans les résultats de TradooIT).

3. Présentation du domaine de la fiscalité et de ses caractéristiques

La fiscalité est un domaine vaste et complexe qui n’a pas un caractère unitaire. Il se caractérise en effet par la présence de plusieurs sous-domaines du droit au sens large, parmi lesquels nous trouvons, entre autres, le droit commercial, le droit de la faillite et le droit tributaire ou droit fiscal. C’est dans cette dernière branche que s’insère la recherche que nous présentons ici. Le droit fiscal, à l’instar de l’économie et de la finance, est caractérisé par une forte pluridisciplinarité car il relève à la fois du droit privé et du droit public et tisse des liens avec le droit des affaires.  La même pluridisciplinarité intrinsèque qui caractérise à son tour la traduction économique et financière et qui se manifeste par une hybridation des textes sur lesquels le traducteur spécialisé est appelé à se confronter. La traduction économique et financière se situe en effet « au carrefour d’une pluralité de domaines qui la traversent de façon transversale et, à maints égards, la sous-tendent » (Maldussi, Wiesmann 2020 : A148)[3]. Que l’on pense, par exemple, à la « place particulièrement importante […] occupée par le droit et ses interrelations avec la comptabilité, cette dernière étant la colonne vertébrale de la communication et de l’analyse financière » (Ibid. : 161)[4].

D’après Wikipédia, « [le] droit fiscal peut être défini comme la branche du droit recouvrant l'ensemble des règles de droit relatives aux impôts. Elle désigne aussi la participation des sujets de droit (personnes physiques, personnes morales) à l'organisation financière de l'État et à l'expression de sa politique économique et sociale »[5]. En guise de préambule, il nous semble particulièrement important de souligner que si d’un côté le droit fiscal établit des connexions avec les différents types de droit susmentionnés, de l’autre il n’existe pas de « définition législative » des termes objets de notre recherche (Beltrame 2021 : 9). Et cela nonobstant le fait que « […] le pouvoir d’imposer est une compétence exclusive de l’autorité souveraine dans l’État. Ainsi, dans les régimes démocratiques, seul le législateur peut créer, modifier ou supprimer un impôt (art. 34 de la Constitution [française] de 1958 » (Ibid. : 10, en caractère gras dans le texte). En France, par exemple, l’article 4 de l’ordonnance du 2 janvier 1959 dispose que l’impôt est une ressource dont la perception doit être autorisée annuellement par le législateur. Parallèlement, dans le droit fiscal italien, le législateur présuppose la notion de tribut, dont le sens est attribué par la doctrine et la jurisprudence. Comme l’écrit Tesauro : « [dans le droit fiscal italien] il n’existe pas de définition législative ni du tribut ni de ses espèces. Le législateur en présume les notions, ce qui rend nécessaire de les assumer dans la signification qui leur est attribuée dans la tradition doctrinale et jurisprudentielle » (Tesauro 2016 : 3)[6]. Il en va de même pour le régime de common law auquel appartient la notion de tax, régime qui se caractérise essentiellement et notoirement par la priorité des décisions jurisprudentielles.

4. Comparaison conceptuelle des notions de taxe et impôt vis-à-vis de tax : approche mixte et différents découpages

4.1 Remarques liminaires

Dans notre article Anisomorphisme et relation de converse à l’épreuve des corpus spécialisés: le couple « créance » / « crédit » par opposition à « credito » (Maldussi 2013), à travers une approche ascendante guidée par des sous-corpus de presse spécialisée de type comparable dans les deux langues italien et français, nous avons approfondi la problématique du différent découpage sémantique qui caractérise les termes créance et crédit par rapport à l’italien credito, rapport que nous qualifions d’anisomorphisme, à savoir une « divergence constatée entre les unités lexicales de deux langues différentes » qui, de ce fait, « s’oppose à l’isomorphisme » (Maldussi 2013). Dans le contexte de la traduction, nous considérons aussi que l’isomorphisme linguistique qui se limite en réalité aux correspondances entre deux langues est à distinguer de l’isomorphisme de traduction, qui est plus large puisqu’il rend compte des équivalences structurales et récurrentes entre deux langues, le critère de similitude cédant alors le pas au critère de l’équivalence au niveau discursif.

La présente étude consacrée à l’analyse de l’anglais tax par rapport aux termes français taxe et impôt, analyse que nous avons élargie également aux termes italiens tassa et imposta, avec des références ponctuelles au milieu bilingue canadien, présente des similarités avec l’analyse susmentionnée : dans les deux cas il s’agit de différents découpages au niveau conceptuel et définitoire de la réalité de l’univers extralinguistique. Dans le premier cas, celui de créance et crédit par rapport à credito, nous avons conclu que, au vu des bases conceptuelles partagées, les différences conceptuelles et définitoires en perspective contrastive n’empêchaient pas la communication et la traduction interlinguistiques en particulier si l’on n’accordait pas trop d’importance aux mots isolés (Prandi 2009)[7]. L’un de nos objectifs est de vérifier si c’est bien le cas de taxe et impôt vis-à-vis de tax dans une perspective interlinguistique. Pour cette nouvelle analyse nous avons toujours recours à la même source, à savoir le Centre National des Ressources textuelles et lexicales (dorénavant CNRTL)[8], qui reprend les définitions du Trésor de la Langue Française (TLF). Le CNRTL recense créance et crédit avec la marque d’usage Droit et impôt et taxe avec la marque d’usage Droit fiscal. Or, si dans le cas de créance et de crédit les contextes d’usage, comme d’ailleurs le montrent les sous-corpus que nous avons utilisés lors de notre recherche précédente (Maldussi 2013), s’avèrent cohérents avec une valeur déjà spécifiée au niveau lexical[9], dans le cas de taxe et impôt il existerait d’importants éléments de confusion qui se traduisent en un degré de complexité majeur : sur fond de définitions nettes au niveau jurisprudentiel et en même temps d’usages répandus dans les pays considérés qui paraissent contredire ces mêmes définitions dans une perspective comparative, le comportement des deux termes dans le discours finit par obscurcir le tableau. Procédons dans l’ordre.

Une première remarque importante distingue les deux cas d’étude. Dans le premier, l’exemple que nous avons considéré et qui a représenté la base de notre analyse a été le suivant:

Le dépôt d’un dossier de surendettement devant la banque de France (BDF) est destiné pour les particuliers endettés et surendettés qui ont souscrit trop de crédits et dettes. Les créances impayées sont des crédits revolving, cartes de crédits permanents, emprunt immobilier, prêt à la consommation, crédit automobile, des emprunts pour travaux, pensions alimentaires, retard d’impôts, surendettement immobilière…pour les propriétaires ou locataires[10] [c’est nous qui soulignons en caractère gras].

Les dictionnaires monolingues repris par le CNRTL considèrent la relation qui lie dette et créance comme une relation d’antonymie[11]. Or, si c’était véritablement le cas, à savoir « si les deux concepts de ‘créances’ et ‘dettes’ étaient véritablement des antonymes, il ne serait pas possible de reprendre anaphoriquement le couple ‘crédits’ / ‘dettes’ par ‘créances’ » (Maldussi : 2013) comme dans l’exemple susmentionné. Il était donc primordial « d’étoffer et d’enrichir le schématisme du rapport d’antonymie entre ‘créance’ et ‘dette’, tel qu’il résulte des dictionnaires monolingues classiques et de préciser les contours de la relation entre ‘crédit’ et ‘dette’ » (Maldussi 2013). La conclusion à laquelle nous sommes arrivés dans notre recherche précédente est que la relation qui lie créances et dettes n’est pas d’ordre antonymique mais plutôt de type converse : « [c]onsidérés isolément, deux lexèmes converses semblent former une opposition ; cependant, s’ils sont saturés de façon adéquate, ils forment des structures sémantiques équivalentes. » (Maldussi : 2013) permettant ainsi la reprise anaphorique.

Or, qu’en est-il du rapport entre impôt et taxe par rapport à tax? Comment justifier les exemples suivants où une taxe est définie comme un type d’impôt, notamment un « impôt ou contribution autoritairement prélevés sur certaines fournitures ou prestations en fonction de leur importance (taxe à l’importation, taxe à la valeur ajoutée) ou encore exigés en contrepartie de prestations spécifiques à caractère public […] » (Valente 1993: 618)? Et l’inverse : « L’impôt sur les sociétés est une taxe annuelle prélevée sur les bénéfices réalisés par les entreprises qui exercent leur activité en France »[12]?

Pour répondre à ces questions qui s’avèrent centrales dans les critères d’usages de ces termes et dans ceux qui président à la traduction des constructions syntagmatiques ayant tax comme élément unitaire, noyau ou modifieur, nous allons premièrement et brièvement focaliser la perspective interlinguistique et comparative qui se situe au croisement des régimes de droit civil et de common law et qui nous amène à réfléchir sur le sémantisme du terme anglais tax. Nous allons ensuite prendre en considération les définitions respectives issues de la jurisprudence qui, comme nous l’analyserons, insistent sur le différent sémantisme des concepts de taxe et d’impôt.

4.2 Le concept hyperonymique de tax

Le concept de tax en anglais évoque concrètement l’obligation pour une personne physique ou morale (en anglais taxpayer, en français contribuable) de payer ou de remettre une somme d’argent à une personne morale de droit public, c’est-à-dire à une administration (government en anglais) locale, régionale ou nationale comme une municipalité, un département (un territoire), une province, un pays, voire à une entité supranationale comme l’Union européenne. Sur la base des définitions dictionnairiques et encyclopédiques dans une optique contrastive, l’anglais tax dénote « […] a compulsory financial charge or some other type of levy imposed on a taxpayer (an individual or legal entity) by a governmental organization in order to fund government spending and various public expenditures (regional, local, or national) […] » (Wikipedia)[13]. Si cette première définition insiste sur le caractère obligatoire du prélèvement, perçu par voie d’autorité, l’encyclopédie Britannica en ligne ajoute un bémol fondamental, à savoir le fait que tax est un prélèvement obligatoire qui n’implique pas en général un service rendu en contrepartie :

Taxes differ from other sources of revenue in that they are compulsory levies and are unrequited—i.e., they are generally not paid in exchange for some specific thing, such as a particular public service, the sale of public property, or the issuance of public debt. While taxes are presumably collected for the welfare of taxpayers as a whole, the individual taxpayer’s liability is independent of any specific benefit received (Cox et al. 2022)[14].

Sur la base de cette définition, le concept général de tax[15] serait proche de celui d’impôt au sens de prélèvement obligatoire. Le terme impôt, dans des usages génériques et classificatoires (souvent au pluriel, impôts directs, direct taxes, par exemple), peut désigner en français tout type d’impôt ou de taxe qu’un contribuable est tenu de payer. Le terme impôt dans la langue courante est ainsi un correspondant fonctionnel de tax en anglais, même si son sens est techniquement plus précis que le sens de ce dernier (l’acception technique de tax en anglais est incluse dans l’acception technique d’impôt en français).

Or, comme le souligne l’encyclopédie Britannica en ligne, des exceptions existent qui impliquent des contreparties déterminées pour le contribuable : « […] payroll taxes, for example, are commonly levied on labour income in order to finance retirement benefits, medical payments, and other social security programs—all of which are likely to benefit the taxpayer » (Cox et al. 2022, le soulignement est dans le texte)[16]. Comme on peut le déduire de cette première définition, le concept de tax n’a pas de correspondant unique ou direct en français puisqu’il inclut les deux concepts de l’impôt et de la taxe. Le nom tête tax s’accompagne en effet d’un substantif épithète, comme dans le cas de payroll tax, ou d’un autre modificateur, comme dans le cas de value-added (tax), pour dénoter la base sur laquelle s’applique ce prélèvement obligatoire. La TVA, en français, est une taxe rangée parmi les impôts sur la dépense ou les dépenses de consommation. La littérature sur la finance publique d’origine de Common Law subdivise le concept de tax en direct taxes (comme par exemple l’impôt sur le revenu qui est un impôt direct) et indirects taxes, comme par exemple les « sales taxes, value-added taxes (VAT), taxes on any aspect of manufacturing or production, taxes on legal transactions, and customs or import duties ». La taxe française, tout comme la tassa italienne rentreraient donc parmi les impôts indirects (indirect taxes). D’après le Centre de ressources en français juridique rattaché à l’Université canadienne de Saint-Boniface :

[i]l existe toutefois un flottement autour des étiquettes servant à nommer certains autres prélèvements de l’État ou d’organismes publics. À ce titre, nous songeons en particulier aux prélèvements que les municipalités et les conseils scolaires perçoivent auprès des contribuables en fonction de la valeur de leurs immeubles ou biens-fonds. Dans la mesure où il s'agit de prélèvements directs, on devrait normalement parler d'impôts fonciers, qui se décomposent en impôt municipal et en impôt scolaire, même si les termes ‘taxes foncières’, ‘taxes municipales’ et ‘taxes scolaires’ sont encore très répandus dans l'usage courant (Centre de ressources en français juridique, en ligne).

Il en va tout autrement en Italie où l’on utilise le terme de tasse scolastiche en raison des services rendus grâce à ce prélèvement. Pour synthétiser, nous pouvons conclure que le français et l’italien possèdent deux définitions et deux termes aux contours bien précis au niveau jurisprudentiel alors que l’anglais, pour exprimer les mêmes concepts, n’utilise que taxes et recourt à deux macrocatégories, celles des direct taxes et des indirect taxes, pour classer respectivement les impôts sur le revenu et la TVA. Le milieu bilingue tel que celui du Canada fait état d’une situation encore une fois différente car ici « l’omniprésence du terme anglais tax cause une certaine confusion par rapport à la nuance de sens entre les termes français impôt et taxe. On a donc tendance à se servir du mot ‘taxe’ pour désigner indistinctement les notions qui se rapportent à ces deux termes » (Centre de ressources en français juridique, en ligne).

4.3 Approfondissements sémantiques de type contrastif : différences entre impôt et taxe

Dans une perspective contrastive, l’anglais tax dénote donc un concept générique et hyperonymique de prélèvement obligatoire alors que le français possède deux cohyponymes, notamment impôt et taxe, regroupés à leur tour sous l’expression hyperonymique de prélèvements obligatoires[17], une notion à laquelle, d’après Beltrame, ont eu recours les statisticiens « [d]evant l’arborescence du phénomène fiscal qui se ramifie quasi à l’infini » et qui est « suffisamment global[e] pour inclure toutes les formes d’imposition » (Beltrame 2021 : 9). Il est intéressant de remarquer que l’italien possède le terme hyperonymique de tributo, « un genre qui comprend – selon la classification traditionnelle – impots, taxes et contributions; certains ajoutent les monopoles fiscaux » (Tesauro 2016 : 4)[18]. En français, le champ sémantique recouvert par le terme anglais tax se divise donc en deux domaines distincts, impôt et taxes. La même distinction existe dans la langue italienne, elle est élaborée par les juristes et « correspond à la distinction que l’on opère en sciences des finances, qui lie les entrées au type de dépenses publiques qu’elles servent à financer » (Ibid.)[19]. En règle générale, l’impôt constitue une somme remise à une personne publique pour le financement de ses activités, et sans contrepartie directe ou précise pour le contribuable. Contrairement à une taxe, un impôt indirect remis à une personne publique en contrepartie d’un service offert par une administration ou de l’utilisation d’un ouvrage public. Alors qu’un impôt, à l’instar de celui sur le revenu, finance la justice, l’éducation, la défense d’un pays, une taxe comme celle d’habitation finance les collectivités territoriales. D’après l’analyse du CNRTL, l’impôt, expression classique du pouvoir d’imposition, est un “[p]rélèvement (pécuniaire) obligatoire sur les ressources des personnes physiques ou morales, servant à couvrir les dépenses de l’État ou des collectivités locales Synon. contribution, droit, imposition, taxe, tribut ». Par emploi métonymique, l'impôt indique tout aussi bien l’ « [e]nsemble de ces prélèvements » que l’« [a]dministration chargée de la détermination et du recouvrement de ces prélèvements ». Il compte également parmi ses synonymes « contribution, droit, imposition, taxe, tribut »[20]. D’après Beltrame

en l’absence de définition législative, l’impôt peut être défini comme une prestation pécuniaire requise des contribuables d’après leurs facultés contributives et qui opère, par voie d’autorité, un transfert patrimonial définitif et sans contrepartie déterminée, en vue de la réalisation des objectifs fixés par la puissance publique (Beltrame 2021 : 9-10, en caractère gras dans le texte).

Comme le précise le même auteur à propos des finalités de l’impôt, « [ce dernier] constitue la ressource des personnes publiques qui poursuivent un but d’intérêt général. Il ne peut donc avoir de contrepartie déterminée pour le contribuable » (Beltrame 2021 : 10). De même, l’essence de l’impôt « est une participation globale à un projet collectif » (Ibid.) qui a un caractère « multifonctionnel » (Ibid.) qui est à même d’assurer « la couverture des charges publiques » et d’être à la fois « un instrument d’intervention économique et sociale » (Ibid.).

Par contre une taxe est une « [p]erception opérée par une collectivité publique à l'occasion de la fourniture à l'administré d'une contrepartie individualisable (d'apr. Jur. 1985). Synon. Redevance »[21]. Les exemples suivants, tirés respectivement des articles 205 et 175 du Code général des impôts, illustrent l’accent mis sur un bien, sur une prestation de service ou tout simplement sur un service, qui constituent autant de contreparties de la taxe :

« La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction »[22].

« La taxe due en application du II de l'article 257 du code général des impôts est exigible à la date de la première utilisation du bien ou lorsque la prestation de service est effectuée »[23].

Pour conclure nous rapportons la définition de taxe donnée par le Centre de ressources en français juridique rattaché à l’Université canadienne de Saint-Boniface qui s’écarte de la définition classique, ce qui prouve la non-conformité des perspectives existantes, focalisant non pas tant la notion de service qui caractériserait la taxe que celle de la perception de la part d’un intermédiaire : « [l]e terme impôt s’entend de tout prélèvement obligatoire que l’État effectue auprès des particuliers et des entreprises pour financer son fonctionnement. Quant à lui, le terme taxe vise une forme particulière d’impôt que l’État prélève par le biais d’un intermédiaire. On qualifie d’indirect ce genre d’impôt » (Centre de ressources en français juridique, en ligne).

4.4 Prédication nominale et flou conceptuel : hypothèses

Après avoir approfondi le concept hyperonymique de tax ainsi que les aspects conceptuels qui distinguent taxe et impôt vis-à-vis de tax, nous reprenons notre analyse de taxe et impôt dans le sillage du procédé utilisé pour créance et crédit et de notre approfondissement sémantique précédent. Nous allons tout d’abord focaliser la relation de synonymie qui est apparue dans la définition des deux termes (comme nous venons de le voir dans la section 4.3, taxe est l’un des synonymes d’impôt) et qui est confirmée par les deux captures d’écran suivantes tirées du CNRTL[24], qui listent par ordre d’importance, les termes synonymiques respectifs. L’aspect intéressant est que les deux termes partagent les mêmes termes synonymiques, en particulier en ce qui concerne les trois premières positions mais en ordre inversé : pour ce qui est d’impôt, nous avons : taxe, contribution, imposition et pour ce qui est de taxe : impôt, imposition, contribution.

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Or, comme l’affirme López Díaz (2018 : 31),

la synonymie totale est théoriquement rejetée, et on préfère admettre une synonymie partielle ou approximative. La raison en est que les distributions des unités du lexique sont différentes et qu’elles n’ont pas le même statut et ne sont pas réellement interchangeables partout et toujours. Aussi accepte-t-on alors plus facilement la prétendue para-synonymie ou quasi-synonymie (2018, en ligne).

Dans le présent article, pour indiquer la quasi totale interchangeabilité des deux termes, nous adoptons l’appellation de quasi-synonymie. Dans le cas de taxe et impôt, le rapport de quasi-synonymie est visiblement fondé sur l’existence d’un radical commun, à savoir qu’il s’agit, dans les deux cas, d’un prélèvement effectué par l’Etat. La quasi-synonymie du rapport existant entre ces deux termes au niveau intralinguistique semblerait donc suffire pour justifier la prédication nominale de type définitoire, comme dans les exemples cités en début de section, où une taxe est définie comme un type d’impôt et l’impôt sur les sociétés est défini come une taxe[25]. De même pour l’italien où les impôts ou droits de successions en français sont en italien des tasse (nom du prédicat) qui se définissent comme des impôts, à savoir des prélèvements, qui grèvent l’axe héréditaire ou la taxe de séjour qui est un impôt à caractère local et et se dénomme en italien imposta di soggiorno. L’hypothèse que nous formulons est que la prédication nominale est consentie au niveau intralinguistique en raison de la quasi-synonymie des termes impôt et taxe et de imposta et tassa. En fait, au vu de l’analyse que nous venons de décrire, elle serait à reconduire au double volet sémantique qui caractérise ces termes : par exemple taxe est à la fois un impôt, au sens de prélèvement obligatoire, et un type d’impôt, à savoir un prélèvement avec contrepartie. De même un impôt est à la fois synonyme de prélèvement obligatoire et un type d’impôt sans contrepartie. Entre le terme taxe et le terme impôt s’instaure un rapport de prédication non seulement en raison de la quasi synonymie mais aussi parce qu’un impôt, dans l’exemple susmentionné, fait référence à l’hypéronyme prélèvement obligatoire. Cette distinction se reflète dans la phraséologie qui accompagne les deux termes et qui diffère selon les cultures fiscales considérées, comme dans le cas du système fiscal français et italien. De même, il existe des emplois où impôt et taxe fonctionnent en réalité en tant qu’hyperonymes, ce qui justifierait aussi la reprise anaphorique, comme dans le cas de la TVA et de sa définition que nous analyserons ci-dessous.

Or, le tableau de la réalité extralinguistique, dans une perspective comparative français-italien, semble encore plus complexe que celui que laisseraient entrevoir la quasi-synonymie de taxe et impôt ainsi que leur double volet sémantique. En France, par exemple, la redevance télévision fait partie des taxes parafiscales, comme l’établit l’article 4 de l’ordonnance du 2 janvier 1959, en vertu duquel les taxes parafiscales étaient « perçues dans un intérêt économique ou social, au profit d’une personne morale de droit public ou privé autre que l’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs » (Beltrame 2014 : 12). Au contraire, en Italie, il s’agirait plutôt d’une imposta di scopo (littéralement, impôt à objectif) à savoir un prélèvement expressément finalisé à la poursuite d’objectifs spécifiques et changeants tels que par exemple le financement d’œuvres publiques. L’exemple le plus éclatant reste toutefois celui de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) en anglais valued-added tax (VAT), en italien IVA (imposta sul valore aggiunto). En France la TVA serait rangée parmi les taxes, de même au Canada, où l’on utilise le syntagme de « taxe de vente » pour désigner la TVA (Centre de ressources en français juridique, en ligne), alors qu’en Italie elle serait plutôt un impôt, comme l’indique la dénomination imposta sul valore aggiunto. Selon le site L’Expert-Comptable.com, le concept de taxe se définit de la façon suivante :

La Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est un impôt indirect sur la consommation. La charge de TVA est supportée par l’acheteur final sur presque tous les biens et services consommés. Néanmoins, c’est l’entreprise productrice du bien ou des services qui collecte cet impôt pour le compte de l’État. L'entreprise facture au client la TVA et la reverse ultérieurement au Trésor, déduction faite de la TVA payée sur les achats constitutifs de son prix de revient. Cet impôt indirect et indolore constitue en effet près de la moitié du budget de l’État et les redressements fiscaux en la matière sont de plus en plus importants et préjudiciables pour les entreprises.[26]

 À ce propos, nous remarquons que l’italien, au vu de la distinction entre tassa et imposta en fonction de l’absence ou de la présence d’une contrepartie, utilise le terme imposta dans la dénomination imposta sul valore aggiunto (IVA) au lieu du terme taxe comme dans le français taxe sur la valeur ajoutée (TVA), soulignant encore plus l’absence de contrepartie directe pour cet impôt général indirect[27] qui frappe tous les stades de transformation d’un produit ainsi que les prestations de service et se caractérise comme un impôt sur la consommation, les investissements et les transferts.

L’actualisation des concepts de l’impôt et de la taxe en français n’est certes pas systématique de sorte que certaines dénominations peuvent renvoyer à l’une ou à l’autre. L’idée que le flou conceptuel entourant les concepts de taxe et impôt dans le discours serait entretenu par le législateur est avancée par Ravelonarivo dans sa thèse de D.E.A. Si d’un côté « [L]e cœur de la distinction de la notion d’impôt et de taxe se situe donc, au fait, dans les caractères de la contrepartie de ces prélèvements obligatoires », de l’autre côté, il n’empêche que:

[e]n réalité, le législateur se passe de cette distinction impôt – taxe. De nombreux impôts (au sens propre) sont qualifiés de taxes et l’intitulé des divers prélèvements opérés par les collectivités publiques ne donne pas d’indication décisive sur leur nature juridique. La TVA, par exemple, n’est pas une taxe mais un impôt (Ravelonarivo 2012 : 71).

Dans une perspective comparative français/italien, c’est le cas par exemple de la taxe foncière qui n’est pas une taxe au sens propre mais un impôt (en italien imposta sulle proprietà immobiliari). De même pour la taxe d’habitation (T.H.) qui en italien devient imposta sul conduttore. Au niveau de l’usage non spécialisé des termes imposta et tassa en italien, le cadre est encore plus nébuleux par le fait que l’expression hyperonymique payer ses impôts se traduit par l’expression italienne pagare le tasse, une utilisation impropre mais lexicalisée du terme tasse alors qu’il s’agit d’impôts[28].

Pour conclure, les aspects culturels liés aux différents usages dans les systèmes fiscaux respectifs, ainsi que les définitions cohérentes au niveau jurisprudentiel qui se heurtent à un usage contradictoire, rendent plus complexe le cadre de l’analyse, auxquels s’ajoute le flou conceptuel induit par le législateur qui entretient parfois la confusion en appelant taxes de véritables impôts. Paradoxalement, c’est bien le manque de cohérence dans la conceptualisation définitoire, persistant en principe, entre taxe et impôt qui finit par favoriser la ressemblance synonymique entre les deux termes. L’usage anarchique des deux termes pousse l’un dans les bras de l’autre : ils peuvent être des termes opposés, synonymiques, hyperonymiques l’un par rapport à l’autre. Les corrélations lexicales, qui devraient se situer dans la structure du lexique, sont démenties par les différents usages où parfois les termes font fonction de quasi-synonymes et parfois d’hyperonymes et de co-hyponymes.

À l’évidence, « [l]es langues naturelles possèdent des tautologies différentes » et, comme nous allons le voir dans les prochaines sections, « c’est bien dans l’acte de traduire que ces contradictions apparentes explosent et sont rendues comparables » (Maldussi 2013 : 483). La comparaison interlinguistique des concepts spécialisés, accompagnée de l’analyse de différents découpages conceptuels au niveau intralinguistique, répond à un double objectif : d’une part elle révèle de différents découpages conceptuels (l’anglais tax qui regroupe les concepts de taxe et impôt), à savoir les anisomorphismes des langues, que la traduction rend visibles et qui fournissent également des indications utiles sur le comportement des termes en discours (comme par exemple le foisonnement de variantes dénominatives). D’autre part, elle met en lumière les stratégies de reformulation intralinguistique qui peuvent servir à leur traduction dans la langue cible (Maldussi, 2013). En effet nous sommes tout à fait convaincus qu’une étude mixte multilingue de type terminologique ne peut faire abstraction de l’activité traduisante (inter- et intralinguistique), comme en dénonçait les dangers Humbley (2011), étant donné la complémentarité évidente entre les deux disciplines. En particulier nous allons examiner les retombées de ces différents découpages dans l’acte de traduire de l’anglais vers le français ainsi que les conditions discursives dans lesquelles s’actualisent ou non ces découpages, et la contribution de la traduction à notre « dossier » terminologique.

5. Méthodes usuelles de traduction de tax en français

Après avoir examiné les critères conceptuels (sémantiques) d’interprétation des concepts et des termes en anglais, en français et en italien tax, taxe, impôt, tassa et imposta, nous examinons ci-après quelles traductions se retrouvent en français dans différentes constructions syntaxiques de tax qui sont susceptibles de favoriser ou de mettre à contribution une analyse conceptuelle distincte. Les observations que nous proposons sont tirées de l’analyse des constructions et des traductions du corpus des 100 premières occurrences du mot-forme tax en anglais et de ses traductions fournies le 9 août 2022 dans l’interface de l’outil en ligne TradooIT (tradooit.com), lequel comprend un concordancier bilingue qui fournit des exemples de traduction tirés de la mémoire publique de l’outil (nous n’avons utilisé aucune mémoire privée).

Le classement des constructions est celui que nous avons adopté dans Poirier (2015) et comprend les emplois unitaires de tax, les emplois de tax comme élément noyau ainsi que les emplois de tax comme élément modifieur (nom en apposition ou en complément). Ces trois constructions comptent respectivement 12 (11,7 %), 22 (21,4 %) et 56 (54,4 %) occurrences sur les 90 occurrences de notre corpus (auxquelles on doit ajouter occurrences 13 (12,6 %) en double qui apparaissent deux fois dans les résultats). Nous sommes parvenus à 103 occurrences du fait que trois segments extraits par TradooIT contiennent une deuxième occurrence de tax qui n’a pas été comptabilisée automatiquement comme une occurrence distincte dans le même segment.

Nous avons compilé toutes les traductions de tax de notre corpus, y compris les traductions non conventionnelles, comme recettes (terme anaphorique, quasi-synonyme discursif d’impôt), et les cas où tax n’a pas de traduction directe pour des raisons discursives ou terminologiques, c’est-à-dire phraséologiques (comme dans income tax return qui est généralement rendu par déclaration de revenu, une réduction courante de déclaration de l’impôt sur le revenu). Les généralisations sur les traductions de tax sont tirées de l’analyse des occurrences de notre corpus de 90 occurrences (103 – 13 doublons).

Grâce à cette méthode d’analyse, notre démarche réflexive prend en compte l’application des critères conceptuels tout comme celle des critères discursifs dans les traductions des concepts de tax, taxe et impôt dans leur micro et macrocontextes d’apparition. L’analyse des traductions vise à faire état des techniques et des particularités d’interprétation qui peuvent s’appliquer à la traduction du concept de tax dans les différentes constructions relevées. Parce que nous essayons de tracer des généralités, nous ne cherchons pas à décrire toutes les possibilités de traduction mais seulement celles qui sont susceptibles d’être récurrentes.

5.1 Les emplois unitaires de tax

Les emplois unitaires de tax comprennent les emplois de tax utilisé seul, ou avec des éléments lexicaux facultatifs (adjectifs qualifiants ou descriptifs[29]). Ces emplois comprennent les constructions dans lesquelles tax peut notamment être : a) complément d’objet (direct ou indirect) d’un verbe ou objet d’un prédicat adjectival; b) sujet de prédicat ou; c) complément de nom, comme dans les exemples ci-dessous qui ont été relevés dans le corpus de 103 occurrences du concordancier TradooIT (les éléments soulignés sont les éléments de base de la construction formée avec l’élément tax en anglais).

  1. 1. This fund is fed by three taxes: […] = Ces ressources proviennent principalement de trois taxes : […] (source : CINEUROPA);
    2. Every registered importer shall collect the tax imposed by this Act from every person to whom the registered importer sells gasoline, aviation fuel or propane. = L’importateur inscrit perçoit la taxe imposée par la présente loi auprès de toute personne à qui il vend de l’essence, du carburant aviation ou du propane. (source : Loi de l’Ontario, Canada)
  2. We must ensure the transparency of our banking sector but, at the same time, we must not unduly burden it with a tax that will put it at a competitive disadvantage to banks in other countries. = Nous devons garantir la transparence de notre secteur bancaire, tout en évitant de le surcharger avec une taxe qui le priverait de son avantage compétitif relativement aux banques d'autres pays. (source : Industrie Canada)
  3. 1. (2 occurrences) As a first step towards this objective, a proportion of these taxes should accrue to the Union budget, on the basis of an agreement between the Member States on certain types of tax. = En guise de premier pas vers cet objectif, un accord entre les États membres sur certains types de taxes doit prévoir qu'une partie de ces recettes soit versée au budget de l'Union. (source : Parlement européen)
    2. As James Tobin said himself, the greater the product of this tax, […] = James Tobin l'a dit lui-même, plus le produit de cette taxe sera important, […] . (source : Parlement Européen)

Les constructions les plus fréquentes dans les emplois unitaires de tax (peu nombreux, 13 au total dans notre corpus, dont une occurrence double où tax est à la fois objet indirect du verbe burden et sujet du verbe put : we must not unduly burden it with a tax that will put it at a competive advantage) sont celles où le concept est complément du nom, de l’adjectif ou de l’objet direct ou indirect du verbe, comme dans les constructions a) ci-dessus qui comptent 7 occurrences en tout. Pour ces sept occurrences d’emplois unitaires de tax, on a constaté 4 occurrences de traduction par taxes en français. On peut penser que la quasi-synonymie de taxe et d’impôt en français et le flou conceptuel lié à ces emplois, favorisent l’utilisation du calque taxes en français dans ces constructions. Il resterait à vérifier cette hypothèse sur un plus grand corpus d’occurrences de tax en situation de complément d’objet.

Dans le cas de la construction to pay tax on sth (qui est un cas particulier des emplois unitaires de tax comme objet direct ou indirect mais qui ne fait pas partie de notre corpus restreint de 103 occurrences de tax) l’utilisation d’un adverbe quantificateur (too much, not enough) fait pencher l’interprétation vers un impôt plutôt qu’une taxe puisque la particularité de l’impôt est qu’il est généralement variable en fonction du revenu gagné par la personne, ce qui n’est pas le cas d’une taxe. Il s’agit ici d’un exemple de raisonnement conceptuel fondé sur le microcontexte discursif qui se fonde sur l’interprétation de l’élément tax dans l’expression à traduire. C’est le cas par exemple d’une autre occurrence de tax dans cette construction (tirée de TradooIT mais pas de notre corpus de 103 occurrences) :

I explain to people in the Netherlands that out of every hundred euros that they earn, they pay forty-three euros in tax and that only one euro of that goes to the European Union. = Aux citoyens des Pays-Bas, j'explique que chaque fois qu'ils gagnent cent euros, ils payent un impôt de 43 euros et que sur cette somme, seul un seul euro va à l'Union européenne.

Cette traduction est d’autant plus remarquable que de façon conceptuelle et générale, l’Union européenne ne prélève pas d’impôt sur le plan juridique. Le raisonnement qui autorise cette traduction particulière tient au fait que l’impôt dont il est question ici est celui d’un État membre de l’Union européenne.

Quelques constructions de notre corpus de 103 occurrences de tax sont équivoques relativement aux interprétations de tax et nous devons nous en remettre au contexte plus large du texte ou de la situation pour bien reformuler celui-ci dans la langue cible. C’est le cas par exemple des occurrences où tax est complément d’un nom ou d’un adjectif comme dans the amount of tax payable et exempt from tax (nos remarques peuvent s’appliquer aussi à la construction passive to be exempted from tax même si cette construction n’a pas été relevée dans notre corpus de 103 occurrences)

Chacune des deux interprétations de tax comme impôt ou comme taxe présente aussi des constructions caractéristiques qui lui sont propres et qui ne sont pas interchangeables. C’est le cas par exemple du verbe to collect dont la complémentation varie s’il s’agit d’un impôt ou d’une taxe : comparez to collect in tax (percevoir via l’impôt, percevoir en impôt) avec to collect tax (percevoir la taxe). D’autres constructions sont propres aux deux interprétations de tax comme impôt ou comme taxe. On y trouve notamment to be exempt from tax, qui peut se rendre par différentes tournures en français, notamment par l’exonération ou l’exemption, dont les usages se confondent bien souvent dans l’esprit des locuteurs, et des traducteurs. Pour des explications détaillées sur ces deux concepts nous renvoyons au Juridictionnaire de Picotte (1996), qui explique ainsi la distinction que l’on doit opérer entre eux :

« L’exonération doit être employée de préférence à l’exemption, sauf lorsqu’il s’agit de dispenses de l’accomplissement d’une obligation fiscale, tel le dépôt de documents.

L’exonération renvoie à la notion de déduction : l’exonération des gains en capital, par exemple, est une autre façon de dire déduction pour gains en capital.

L’exemption est un allégement fiscal accordé au contribuable. »

Comme sujet dans les constructions de type b), on trouve dans les trois occurrences de notre corpus deux traductions par taxes et une occurrence non traduite (attribuable à une contraction de texte) mais qui serait traduite vraisemblablement par taxe puisqu’elle renvoie à un prélèvement fait sur les billets de cinéma. Ici encore, il faudrait vérifier si cette analyse se vérifie sur un plus grand nombre d’occurrences, une vérification que les outils de gestion des corpus parallèles (comme Sketch Engine) ne permettent pas encore.

5.2 Les emplois de tax comme noyau syntaxique

Nous nous intéressons dans ces constructions aux occurrences de tax qui font partie du noyau d’un syntagme nominal en tant que nom noyau (a), accompagné d’un ou de plusieurs compléments ou adjectifs, ou d’un syntagme verbal en tant que verbe au centre d’un prédicat verbal (b). Les exemples ci-dessous illustrent ces constructions qui sont de loin beaucoup plus fréquentes dans leur forme nominale.

  1. For ourselves as Swedish Social Democrats, it is extremely important for us to be able to retain national tax, since that is the system to which we adhere and of which we make use. = Pour nous, sociaux-démocrates suédois, il est de la plus haute importance de pouvoir conserver l'impôt national car il s'agit du système auquel nous adhérons et que nous utilisons. (source : Parlement européen)
  2. There is a general international tax principle that the country in which immovable property is located should have the right to tax the gains from the disposition of such property. = Selon un principe général de la fiscalité internationale, le pays où se trouvent des biens immeubles devrait avoir le droit d'imposer les gains qui découlent de leur disposition. (source : Hansard du Canada)

L’analyse des 22 occurrences de notre corpus révèle une nette préférence dans ces constructions pour la traduction avec impôt, qui caractérise 14 (64 %) des 22 occurrences, et la seule occurrence verbale de notre corpus est également traduite par le verbe imposer. La traduction avec taxe compte pour 5 occurrences sur 22. On trouve pour les deux autres occurrences une non-traduction par effacement du concept impôt, le même cas qui est mentionné au début de la section comme une traduction terminologique, c’est-à-dire phraséologique de income tax return par déclaration de revenus, laquelle représente une réduction du terme déclaration de l’impôt sur le revenu, ainsi qu’une autre occurrence plus simple de income tax qui est alors rendu par le terme simple déclaration. Ces deux derniers exemples de traduction peuvent être assimilés à des occurrences de traduction de tax par impôt, même si ce dernier concept est effacé par réduction discursive ou terminologique.

5.2.1 Les traductions de tax par impôt

Nous examinons ci-après les différents critères peuvent expliquer la prédilection pour impôt en français dans les constructions où l’élément tax est le noyau d’un syntagme nominal. Comme nous l’avons observé pour la fréquence, et dans la première partie de l’article, la traduction de tax par impôt est plus fréquente et semble procéder d’une relation de traduction générale qui peut s’employer lorsque le contexte de la communication ne permet pas de discriminer précisément en français entre taxe et impôt. Une erreur de traduction assez courante dans ces contextes génériques consiste donc à traduire systématiquement tax par taxe en français, et à préférer ainsi le calque plutôt que de favoriser le générique établi en français qui est le concept d’impôt.

Sur le plan conceptuel, pour fonder la traduction de tax par impôt, on cherchera dans les contextes communicationnels la référence positive à des pays et à d’autres concepts que l’on retrouve dans le champ notionnel de l’impôt : les crédits, les allègements (relief), les points d’impôt, les réductions, etc. Comme nous avons vu précédemment avec un emploi unitaire de tax, la mention de l’année pourra aussi conduire à cette interprétation.

Il existe aussi le sens d’impôt lorsque tax est associé à l’idée d’une facturation, d’un paiement non immédiat du prélèvement qui, dans le cas d’une taxe, est souvent immédiat et n’est que rarement reporté dans le temps. On cherchera aussi des notions comme la somme de l’impôt à payer qui, contrairement à une taxe, qui varie en pourcentage mais dont le pourcentage est le même pour tous les contribuables ou biens et services assujettis, s’applique généralement à des tranches de revenus pour les particuliers ou de chiffres d’affaires pour les entreprises, et varie ainsi d’un particulier ou d’une entreprise à l’autre.

Une autre caractéristique importante qui permet de différencier l’impôt de la taxe, nous le rappelons (cfr section 4 et suivantes) est le fait que l’impôt est un prélèvement obligatoire qui ne vise que les personnes physiques ou morales qui ont la citoyenneté ou qui ont été constituées dans le pays tandis qu’une taxe est généralement prélevée sur des activités ou des biens ou services assujettis, peu importe si la personne morale ou physique qui les paie est un citoyen ou une entreprise a été constituée dans ce pays.

Ces deux derniers critères, à savoir la variation de la somme à payer ainsi que les personnes assujetties au prélèvement, jouent un rôle important qui fait partie des éléments de sens qui permettent de départager l’impôt de la taxe.

5.2.2 Les traductions de tax par taxe

Nous examinons ci-après les différents critères peuvent expliquer la prédilection pour taxe en français dans les constructions où l’élément tax est le noyau d’un syntagme nominal. D’après les données compilées dans notre corpus de 103 occurrences de tax, les cinq occurrences de tax comme élément noyau d’un syntagme nominal qui se traduisent par taxe sont toutes accompagnées d’adjectifs descriptifs ou relationnels : Tobin tax (taxe Tobin, du nom de son premier promoteur (trois occurrences) ainsi que Annual Circulation Tax et Registration Tax qui sont mentionnées toutes les deux dans le même segment traduit, ce qui incite à assimiler la première occurrence à une taxe vu que la Registration Tax semble bien évidemment associée à un prélèvement fourni en contrepartie d’un droit d’immatriculation (dans le contexte des mesures pour contrer la pollution des véhicules automobiles). Ce dernier exemple montre très bien de quelle façon le raisonnement à partir du micro-contexte est essentiel dans l’application des critères conceptuels mis en évidence dans la section précédente de notre article.

Comme pour mettre en évidence la force d’attraction de taxe dans les constructions où tax est un noyau accompagné d’adjectifs ou de noms relationnels, l’examen de la liste des sous-domaines de la fiscalité dans le thésaurus EuroVoc, met en évidence le fait que, malgré l’appellation générique qui se traduit par impôt (tax on consumptionimpôts sur la consommation), la plupart des types de tax on consumption (soit excise duty, export tax, import tax, stamp duty, fuel tax, vehicle tax et VAT) ont comme correspondant en français taxe. Une autre dénomination en anglais intervient également dans ce cas avec le terme duty qui en général a comme équivalent droit sauf dans le cas de excise duty qui correspond à accise (on trouve par ailleurs un nombre élevé d’occurrences de taxes d’accise, une redondance qui, à notre avis, peut s’expliquer par l’opacité du terme accise).

L’examen des différents types d’impôt dans le vocabulaire EuroVoc montre aussi que, dans le cas des constructions de tax avec complément du nom noyau comme pour tax on capitalimpôt sur le capital (wealth tax, capital transfer tax, registration tax), les traductions en français semblent privilégier impôt. De même en est-il de tax on income et de ses différents types conceptuels dont la forme contient non pas des adjectifs antéposés mais des compléments du nom en bonne et due forme (personal income tax, property tax, capital gains tax, tax on profits of self-employment, tax on investment income, tax on employement income, corporation tax), à l’exception de business tax, qui correspond à taxe professionnelle.

L’examen des différents contextes de traduction de tax par taxe dans TradooIT fournit quelques repères conceptuels qui permettent aux traducteurs de trancher en faveur de taxe lorsqu’ils doivent interpréter en français le sens de tax comme élément noyau d’une expression.

Comme pour l’interprétation de tax comme impôt, on trouve un certain nombre d’éléments de sens fournis en contexte qui favorisent l’interprétation de tax comme une taxe. On trouve par exemple, les contextes commerciaux dans lesquels le prélèvement est effectué à la vente d’un bien ou d’un service (retail sales tax = taxe de vente au détail). Dans ce cas, l’interprétation de taxe en français et la dimension de sa perception indirecte (par un intermédiaire, cfr section 4 et suivantes) a pris la place que pourrait théoriquement occuper ici la notion d’impôt puisque dans ces cas particuliers, le prélèvement est fait sans contrepartie pour le contribuable. Cet usage de taxe en français reste très répandu et est bien implanté, aussi bien au Canada dans goods and services tax rendu par taxe sur les produits et services qu’en Europe dans value-added tax (VAT) rendu par la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) (voir à ce propos la section 4.6). Aux États-Unis, puisqu’il n’y a pas de taxe uniforme s’appliquant à l’ensemble du pays, on trouve plutôt l’expression sales tax ou use tax qui se rendent par taxe de vente ou taxe d’utilisation. Au Canada, on trouve aussi les provincial sales tax (PST) soit les taxes de vente provinciales (TVP) qui s’ajoutent à la taxe sur les produits et services, ou, en concurrence avec celle-ci, la harmonized sales tax rendue par taxe de vente harmonisée dans certaines provinces qui n’imposent pas de taxe de vente provinciale.

L’acception de taxe peut aussi s’appliquer dans des contextes moins évidents lorsqu’il s’agit par exemple d’un secteur d’activité économique comme dans le secteur de l’aviation ou des transports ainsi que dans le secteur bancaire. De même, on peut élargir cette interprétation à l’ensemble de la situation fiscale de l’Union européenne et de son budget dans lequel il n’existe pas d’impôt européen (Dussart, 2012). Ainsi, dans le contexte de l’Europe, l’interprétation de tax n’est plus équivoque sur la distinction entre impôt et taxe puisqu’il n’y a aucune mesure législative du parlement européen qui rendrait légitime la perception d’un impôt européen. Pour bien appliquer ce principe de traduction, encore est-il indispensable de vérifier qu’il s’agit ici des institutions fiscales européennes et non pas de leurs états membres. On cherchera aussi dans l’interprétation de tax comme taxe des indications d’activités internationales sur les marchés des changes (par exemple la taxe sur les transactions commerciales aussi appelée, Tobin tax rendu par la taxe Tobin, finalisée à enrayer la volatilité des taux de change), les importations, l’environnement et l’immigration (head tax rendu par une taxe d’entrée).

Dans des contextes similaires à celui de l’impôt où la taxe est prélevée et payable, la présence d’autres éléments de sens déterminants sera à rechercher comme le verbe to collect (un intermédiaire prélève la taxe qu’il remet ensuite à la puissance publique qui en impose son prélèvement), le verbe to trigger dans le cas d’un choix exercé par une entité assujettie à un traitement fiscal, ou l’adjectif payable, qui, contrairement à l’impôt, vise alors un bien ou un produit en particulier comme dans tax payable on cigars or other tobacco rendu par taxe sur les cigares ou autres produits du tabac, ou sugar tax rendu par taxe sur le sucre.

En terminant, il existe également des dérivés formés avec tax qui se traduisent aussi par taxe, soit tax-inclusive price rendu par taxe incluse dans les prix ainsi que le verbe to take the tax off sth rendu par détaxer.

5.3 Les emplois de tax en apposition

Comme nous l’avons mentionné au début de la section sur les méthodes de traduction de tax, les constructions dans lesquelles tax est utilisé en apposition, et donc comme adjectif classifieur ou relationnels, sont les plus nombreuses de notre corpus puisqu’elles comptent 56 (54,4 %) occurrences sur les 103. Les deux exemples ci-dessous fournissent des exemples de ces constructions caractéristiques dans lesquelles la traduction de l’élément tax a été analysée.

  1. As much as the Conservatives want to rail against the prevailing tax rate, the fact of the matter is that the corporate tax rate has gone from 28% in the year 2000 to just 15% today. = Les conservateurs ont beau fulminer contre le taux d'imposition en vigueur, le fait demeure que le taux d'imposition des sociétés est passé de 28 % en 2000 à seulement 15 % aujourd'hui. (source : Hansard du Canada)
  2. In the end, five low-budget projects were chosen: each fiction feature will receive €250,000 in production support (including tax credit), while the documentary projects will get €87,000. = Ont été finalement choisis cinq projets à petit budget qui seront appuyés en production à hauteur de 250 000 euros (crédit d'impôt inclus) pour une fiction et 87 000 pour un documentaire. (source : CINEUROPA)

Il est remarquable et intéressant d’observer, en lien avec le flou conceptuel mis au jour dans la section 4, qu’en vertu de leur nature relationnelle et non conceptuelle, les emplois de ce type de construction sont le plus souvent traduits par l’adjectif de relation fiscal et ses dérivés (fiscalité, fiscaliste), et non pas par les traductions conceptuelles de tax (impôt ou taxe). Dans notre corpus, nous avons en effet compté 26 traductions de ce type sur les 56 occurrences de cette construction, ce qui représente près de la moitié d’entre elles (46%). On constate en nombre que les traductions avec le complément du nom d’impôt ou d’imposition arrivent au second rang des fréquences avec 20 occurrences sur 56, soit 35 % de celles-ci. Pour ce qui est de taxe, on trouve seulement quatre traductions de ce type, parmi lesquelles on trouve une erreur (une occurrence qui devrait être traduite par impôt car le contexte montre qu’il s’agit clairement d’un d’impôt), une expression complexe qui contient plutôt un élément noyau qui est lui-même en apposition avec un autre terme (Excise Tax Act qui a comme équivalent Loi sur la taxe d’accise), un type de construction qui présente des difficultés d’analyse de traduction sur lesquelles nous souhaitons revenir dans un autre cadre, et deux occurrences du même nom propre Tax Shelter qui a été repris tel quel en français et qui n’a donc pas été traduit. Enfin, on trouve six autres occurrences dans notre corpus, dont trois qui sont des traductions non conventionnelles et trois autres qui sont des non-traductions (fusion sémique de l’élément tax comme dans tax lawyer traduit par fiscaliste).

5.3.1 Quelques difficultés de traduction de tax en apposition

Les noms noyaux associés à tax se traduisent bien entendu d’après leur acception particulière conventionnelle. On trouve toutefois des exceptions avec tax rules et tax treaties et tax reduction, relief dont le noyau a comme correspondant non conventionnel (moins courant et plutôt inattendu) : code fiscal, conventions fiscales et allégement ou dégrèvement fiscal. On a relevé aussi, en dehors de notre corpus de 103 occurrences, un terme que l'on pourrait considérer comme un composé tellement son acception et ses emplois sont particuliers : tax base qui désigne, pour les contribuables, la somme totale (chiffre d'affaires ou valeur) qui est assujettie à un prélèvement obligatoire. Comme les prélèvements sont définis comme des pourcentages de cette somme, plus celle-ci est élevée, plus le prélèvement est élevé. L’équivalent de ce nom composé le plus fréquent dans la mémoire publique de TradooIT (avec 1518 résultats sur une total de 1941, recherche du 8 novembre 2022) est assiette fiscale, avec la variante base (fiscale) qui est moins courante (avec 23 occurrences sur les 1941).

Le terme tax dans cette construction entre dans quelques expressions courantes qui évoquent la fiscalité d’un pays : for tax purposes, à des fins fiscales, in tax matters (en matière fiscale), tax related subsidies (subventions fiscales).

5.3.2 Les constructions équivoques de tax en apposition

Certaines constructions formées avec tax en apposition résistent à l’interprétation polarisée en français avec taxe ou impôt. Pour trancher, il faut alors s’en remettre à un contexte plus large de type textuel ou situationnel. C’est le cas des constructions tax increases qui peut se dire aussi bien d’un impôt que d’une taxe, ainsi que de l’expression tax revenues, comme dans les exemples suivants qui ont été rendus par l’un ou l’autre terme. Avec impôt :

If we are talking about the 1% creating 40,000 jobs, the tax revenues created by that, in and of itself, will have a dramatic impact on what our federal fiscal picture would look like. = Vous dites qu'une réduction de 1 p. 100 pourrait créer 40 000 emplois; les impôts additionnels qui seraient prélevés amélioreraient grandement notre situation fiscale au niveau fédéral. (source : Chambre des communes, Canada).

Avec taxe :

I can tell you, Mr. St. Amand, that from our manufacturer's perspective, we've contributed over $500 million in tax revenue since we've had our licence. = e peux vous dire, monsieur St. Amand, que nous, en tant que fabricants, avons versé plus de 500 millions de dollars en taxes depuis que nous avons obtenu notre licence. (source : Chambre des communes, Canada). Dans le dernier exemple, il est fait allusion à une entreprise qui œuvre dans le secteur des produits du tabac qui font l’objet d’un pourcentage important de taxes à la consommation.

Dans d’autres cas, l’ambiguïté est préservée en français dans ces constructions grâce au recours à l’adjectif fiscal qui ne permet pas de trancher en faveur d’un impôt ou d’une taxe. En effet, le prochain exemple montre bien que malgré les indices cotextuels qui favorisent l’interprétation de taxe en français, la traduction recourt plutôt à l’adjectif fiscal qui neutralise en quelque sorte l’interprétation de tax en tant que taxe.

Fourth, we recommend that the federal government increase its percentage of gasoline tax revenues spent on highway investment to address the immediate needs of Canada's national highway system. = Quatrièmement, nous recommandons que le gouvernement fédéral augmente la proportion des recettes fiscales de l'essence qu'il consacre au réseau routier, pour répondre à ses besoins immédiats. (source : : Chambre des communes du Canada).

Dans cet autre exemple, c’est l’interprétation de tax comme impôt qui est neutralisée avec l’emploi de l’adjectif fiscal :

They may say that publicly, but what they mean and what they intend is that if a majority of Canadians maxed out their contributions at $10,500, it would cost the government money in lost tax revenue. = Ça, c’est ce qu’ils disent en public, mais la vraie raison, c’est que, si une majorité de Canadiens verse le maximum autorisé, soit 10 500 $, ce sont des recettes fiscales en moins pour le gouvernement. (source : Hansard, Canada).

L’examen du macrocontexte, c’est-à-dire le document dans lequel est prélevé ce dernier segment traduit, indique qu’il s’agit du programme CELI (compte d’épargne libre d’impôt) ou TFSA (tax-free savings account). Par conséquent, il aurait été tout indiqué que la traduction de cette occurrence de tax soit impôt plutôt que l’adjectif neutre fiscal qui s’emploie légitimement quand le contexte ne permet pas de déterminer qu’il s’agit de taxe ou d’impôt, ce qui n’est pas le cas ici.

Ces deux exemples contrastent en effet avec l’exemple « légitime » qui suit dans lequel sont réunis de façon équivoque les deux interprétations de tax comme taxe et comme impôt :

The country is feeling the effects of lower than forecast tax revenue and sluggish private consumption growth, as the economy recovers more slowly than expected. = Le pays se ressent des effets de recettes fiscales moindres que prévu et d'une consommation privée peu dynamique, l'économie se redressant plus lentement qu'escompté. (source : OCDE)

Ces quelques exemples montrent bien la grande variation des traductions en français de l’élément tax en apposition avec trois correspondants usuels, par ordre de fréquence, soit fiscal et impôt et taxe. On observe en outre que la prépondérance de l’adjectif fiscal s’explique à juste titre du fait que bon nombre d’emplois de tax en apposition sont caractéristiques d’un sens relationnel et non pas conceptuel de tax, d’où la traduction usuelle distincte de ces occurrences par l’adjectif fiscal.

6. Conclusion

La recherche que nous présentons ici s’articule sur deux plans : après avoir présenté la méthode d’extraction des notions clés et les particularités du domaine concerné, nous avons en premier lieu abordé la formalisation des concepts de tax et de ses équivalents taxe et impôt. Puis nous avons extrait, grâce au concordancier bilingue TradooIT, les différentes traductions de tax par impôt et de tax par taxe, avec un focus particulier sur les emplois unitaires de tax, les emplois de tax comme élément noyau et les emplois de tax come élément modifieur, à savoir en apposition ou en complément. Notre recherche s’est heurtée à plusieurs aspects visiblement contradictoires mais qui, en dernier ressort, comme le montre la deuxième partie de notre étude, ne constituent pas un obstacle à la traduction interlinguistique; au contraire cette dernière finirait par refléter ces mêmes contradictions, l’exemple le plus patent étant celui de value added tax pour lequel le français utilise taxe et l’italien imposta. Or, les résultats de cette deuxième analyse ne se limitent pas à confirmer la formalisation conceptuelle de tax, taxe, et impôt. Au contraire, ils l’étoffent et l’enrichissent grâce à l’analyse des constructions conventionnelles qui respectent les critères conceptuels préalablement définis et non conventionnels qui obéissent à des considérations discursives et fonctionnelles plus larges.

Le plan culturel lié aux usages divers en vigueur dans les différents systèmes fiscaux (civil law versus common law) auquel s’ajoute le flou conceptuel induit par le législateur face à une cohérence définitoire qui, comme nous l’avons écrit, ressemble plutôt à une tentative velléitaire de normalisation constituent autant d’éléments qui risquent d'assombrir encore plus le tableau. Or, ce manque de cohérence finit paradoxalement par favoriser la ressemblance synonymique entre le deux termes taxe et impôt, ces derniers étant tous les deux des « prélèvements obligatoires » effectués par l’État. La preuve en est la possibilité de la prédication nominale, ce qui fait qu’une taxe sur les sociétés est un impôt, et vice versa.

Notre objectif était donc celui de vérifier comment la formalisation conceptuelle effectuée dans la première partie de notre article, avec tous ses aspects contradictoires, se reflète dans les traductions extraites du concordancier bilingue TradooIT. En particulier si cette analyse préliminaire pouvait éclairer l’utilisation de taxe et impôt dans la traduction de différents emplois de tax, faisant émerger les stratégies sous-jacentes et les généralisations d’emploi possibles. Or, comme notre analyse l’a démontré, le cadre est obscurci par le fait que les corrélations lexicales, qui devraient se situer dans la structure du lexique, sont démenties par les différents usages fonctionnels ou discursifs où parfois les termes font office de quasi-synonymes et parfois d’hyperonymes et de co-hyponymes.

En règle générale, notre analyse de 103 occurrences de tax a mis en évidence la prépondérance de la traduction par taxe pour les constructions unitaires, de la traduction par impôt pour les constructions dans lesquelles tax est l’élément noyau et de la traduction par fiscal pour les constructions dans lesquelles tax est employé comme élément de sens relationnel. Il est intéressant de constater que chaque type de construction privilégie une traduction différente et que les solutions de traduction privilégiées concordent avec le degré de difficulté et les limites de l’analyse conceptuelle présentée en première partie. À titre d’exemple, on peut émettre l’hypothèse que si les emplois unitaires de tax sont le plus souvent traduits par taxe en français, ceci peut être attribué au fait que l’analyse conceptuelle nécessaire au raisonnement qui préside à l’interprétation correcte du terme en anglais est moins concluante lorsqu’il s’agit d’emplois unitaires de tax puisqu’ils ne sont pas associés à des informations (compléments, adjectifs) discriminantes. De même, on peut émettre l’hypothèse que si la traduction par impôt est la plus fréquente dans les constructions où tax est l’élément noyau, c’est parce que le terme impôt en français se présente conceptuellement comme l’élément générique, hyperonyme de taxe. Quant aux caractéristiques de la traduction des emplois en apposition, celles-ci montrent bien la dimension relationnelle qu’incarne l’adjectif fiscal par rapport aux traductions conceptuellement courantes avec impôt ou taxe.

Dans d’autres cas, c’est le recours au contexte plus ample qui permet d’interpréter tax en tant qu’impôt ou taxe, comme dans le cas des expressions is exempt from tax et to pay tax où l’utilisation d’un adverbe quantificateur (too much, not enough) fait pencher l’interprétation vers un impôt plutôt qu’une taxe. Le terme impôt prévaut aussi dans certaines expressions phraséologiques comme to pay one’s fair share of tax qui a comme équivalent isomorphe en français payer sa juste part d’impôt où ce dernier est à interpréter en tant que prélèvement obligatoire sans contrepartie. Dans plusieurs cas, les deux termes présentent des constructions caractéristiques qui ne sont pas interchangeables comme le montrent les cas de to collect in tax, percevoir via l’impôt et to collect tax, percevoir la taxe.

Pour conclure, une piste de recherche prometteuse pourrait nous amener à nous interroger si le flou conceptuel législatif et terminologique qui a été décrit en première partie ne pourrait pas faire place en traduction pour ainsi dire à d’autres critères de différenciation conceptuels non conventionnels repérés dans le discours. L’impôt en français pourrait ainsi constituer un prélèvement obligatoire non immédiat qui varie en fonction des revenus perçus par la personne ou du chiffre d’affaires réalisé par une entreprise, tandis que la taxe constituerait un prélèvement obligatoire immédiat ou ponctuel qui varie en pourcentage du prix d’un bien ou d’un service assujetti (sans aucune considération du revenu ou du chiffre d’affaires). Certains usages de taxe comme noyau syntaxique montrent aussi sa prédominance dans le contexte d’activités internationales et supranationales (comme dans le cas de l’Europe), a contrario de l’impôt qui est indissociable d’une personne morale de droit public national et international.

Danio Maldussi est l’auteur des sections 3 et 4 ainsi que de la conclusion ; Éric Poirier est l’auteur des sections 2 et 5 ainsi que de l’introduction.

Références

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Notes

[1] Il peut s’agir d’erreurs de traduction dans le choix à opérer entre les différents correspondants proposés dans les dictionnaires, d’une traduction non littérale (adaptation) qui est ancrée dans une construction syntaxique similaire à celle du texte de départ ou d’une absence de traduction (omission) pour laquelle le contexte ou le co-texte pallie la même information.

[2] [url=https://eur-lex.europa.eu/browse/eurovoc.html?locale=fr]https://eur-lex.europa.eu/browse/eurovoc.html?locale=fr[/url]

[3] « La traduzione in ambito economico-finanziario si situa al crocevia di una pluralità di domini che la attraversano trasversalmente e, per molti aspetti, la sottendono ».

[4] « In particolare, riveste una primaria importanza, […] l’ambito giuridico nelle sue interrelazioni con la contabilità, essendo quest’ultima l’ossatura portante dell’informativa e dell’analisi finanziaria ».

[5] [url=https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_fiscal]https://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_fiscal[/url].

[6] « [..] non esistono definizioni legislative né del tributo, né delle sue specie. Il legislatore ne presuppone le nozioni, per cui è necessario assumerle nel significato che ad esse è attribuito nella tradizione dottrinale e giurisprudenziale ».

[7] Comme l’écrit Prandi, “L’anisomorfismo non si lascia facilmente ridurre, ma in compenso non ha ricadute serie sulla comunicazione interlinguistica” (Prandi 2009).

[8] « Créé en 2005 par le CNRS, le CNRTL fédère au sein d’un portail unique, un ensemble de ressources linguistiques informatisées et d’outils de traitement de la langue. Le CNRTL intègre le recensement, la documentation (métadonnées), la normalisation, l’archivage, l’enrichissement et la diffusion des ressources. La pérennité du service et des données est garantie par l’adossement à l’UMR ATILF (CNRS – Nancy Université), le soutien du CNRS ainsi que son intégration dans le projet d’équipement d'excellence ORTOLANG ». La page est disponible à l’adresse suivante : [url=https://www.cnrtl.fr/]https://www.cnrtl.fr/[/url].

[9] Contrairement au français, où les deux termes possèdent déjà des valeurs distinctes, en italien c’est bien le cotexte entourant le terme polysémique credito, en particulier grâce à la fonction des verbes supports, qui a la fonction d’en préciser la valeur pertinente, à savoir s’il s’agit d’une somme à recevoir ou d’un prêt à accorder.

[10] [url=https://www.rachatducredit.com/dossier-surendettement/]https://www.rachatducredit.com/dossier-surendettement/[/url].

[11] [url=https://www.cnrtl.fr/definition/creance]https://www.cnrtl.fr/definition/creance[/url]

[12] [url=https://infonet.fr/lexique/definitions/impot-sur-les-societes/]https://infonet.fr/lexique/definitions/impot-sur-les-societes/[/url]

[13]https://en.wikipedia.org/wiki/Tax.

[14] [url=https://www.britannica.com/topic/taxation]https://www.britannica.com/topic/taxation[/url].

[15] La finalité des taxes ne fait pas l’unanimité. D’après Bowler-Smith et Ostik, « [c]ommon-law jurisprudence characterises a tax as a compulsory payment imposed by a public body for a public purpose under the authority of the legislature. While useful in many situations — and despite judicial statements that a tax is not a penalty, fine or user charge — this understanding of a tax fails to make clear how some other transactions should be classified. This is arguably because certain elements of the common-law characterisation are lexically inappropriate, logically redundant and inconsistent with extant decisions. This article proposes an alternative. It argues that a tax is a compulsory transfer of value imposed primarily for a redistributive purpose » (Bowler-Smith et Ostik 2018).

[16]https://www.britannica.com/topic/taxation.

[17] Contrairement à créance et crédit qui ne possèdent pas de concept hyperonymique.

[18] « un genus comprendente – secondo la classificazione tradizionale – imposte, tasse e contributi; taluni aggiungono i monopoli fiscali ».

[19] « corriponde alla distinzione della scienza delle finanze, che collega le entrate al tipo di spese pubbliche che servono a finanziare ».

[20] [url=https://www.cnrtl.fr/definition/impot]https://www.cnrtl.fr/definition/impot[/url]

[21] [url=https://www.cnrtl.fr/definition/taxe]https://www.cnrtl.fr/definition/taxe[/url].

[22] [url=https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006294407]https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006294407[/url].

[23] [url=https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000022816584]https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000022816584[/url]

[24] Les deux captures d’écran sont disponibles respectivement aux adresses suivantes: https://www.cnrtl.fr/synonymie/impot et https://www.cnrtl.fr/synonymie/taxe.

[25] [url=https://infonet.fr/lexique/definitions/impot-sur-les-societes/]https://infonet.fr/lexique/definitions/impot-sur-les-societes/[/url]

[26] [url=https://www.l-expert-comptable.com/dossiers/la-taxe-sur-la-valeur-ajoutee-ou-tva.html]https://www.l-expert-comptable.com/dossiers/la-taxe-sur-la-valeur-ajoutee-ou-tva.html[/url]

[28] D’après le dictionnaire en ligne Treccani, taxe, dans la langue courante (non spécialisée), est un synonyme impropre d’impôt et a une valeur plus générique et globale par rapport à ce dernier, dénommant tout type de prélèvement. En outre, taxe, toujurs dans l’usage ordinaire, est également un synonyme impropre de tarif, comme dans l’exemple de « tasse aeroportuali », en français redevances aéroportuaires. Cette page est disponible à l’adresse suivante: [url=https://www.treccani.it/vocabolario/tassa_res-269079a9-0036-11de-9d89-0016357eee51/]https://www.treccani.it/vocabolario/tassa_res-269079a9-0036-11de-9d89-0016357eee51/[/url].

[29] Ceux-ci s’opposent aux adjectifs classifieurs ou relationnels (European Tax, par exemple), lesquels sont essentiels au syntagme nominal et correspondent à des compléments du nom noyau.

About the author(s)

Danio Maldussi is Associate Professor at the Department of Foreign Languages, Literatures and Cultures of the University of Bergamo. His main research interests lie in the specialised translation, with particular reference to didactic, linguistic-terminological, semantic-conceptual, ideological and metaphorical aspects of financial, legal and accounting discourse from French into Italian.in particular financial, legal, accounting and marketing translation, with particular reference to the educational implications of machine translation. Other interests include the methodological and didactic implications triggered by machine translation and post-editing.

Éric A. Poirier, associate professor of translation and program director in the Department of Modern Languages and Translation at the Université du Québec à Trois-Rivières, has worked as a professional translator for 18 years and teaches mainly translation methodology and financial translation from English to French. He is the author of the textbook Initiation a la traduction professionnelle : Concepts clés. His research interests include the empirical evaluation of translated texts and the science of translational data and its applications to translation practices, teaching and learning.

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©inTRAlinea & Danio Maldussi & Éric A. Poirier (2023).
"L’analyse conceptuelle des éléments tax, impôt et taxe à l’épreuve de la formalisation distributionnaliste des exemples de traduction de tax comme élément unitaire, noyau ou modifieur"
inTRAlinea Special Issue: Terminologia e traduzione: interlinguistica, intralinguistica e intersemiotica
Edited by: Danio Maldussi & Eva Wiesmann
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Stable URL: https://www.intralinea.org/specials/article/2637

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